Destinée

«Dry land is not just our destination, it’s our destiny!» – Dennis Hopper, Waterworld

Allez, avouez-le, jamais vous ne m’auriez cru capable de commencer une chronique sur la finale d’association de l’Est avec une réplique de Waterworld, n’est-ce pas?

Depuis le début des séries, c’est un peu devenu un gimmick tant avec mes amis que sur cette page : avant chaque match du Canadien, je fais systématiquement les prédictions les plus pessimistes possible, en partie parce que je ne veux pas jinxer mon équipe, mais aussi parce qu’à chaque fois où j’avais prédit une victoire, le CH c’est écrasé à chaque fois (match #2 et #5 contre Washington).

Rendu au septième match contre Pittsburgh, même si je déclarais à qui voulait l’entendre que les Penguins allait l’emporter, même si j’étais aussi nerveux qu’un gars qui s’apprête à se faire enfoncer le petit Q-tip vert dans l’urètre, en réalité, je me doutais bien que le Canadien allait éliminer Sid the little Kid, Stall le consanguin et criss Letang (y’a sûrement une couple de mes amis qui doivent crier «menteur» en ce moment devant leur ordi, mais c’est pourtant la vérité).

Et comment j’ai su? Quand ça fait 25 ans que tu suis activement le hockey, le baseball, le basket et le football, tu finis par reconnaître certains patterns lorsqu’ils se présentent à toi, par exemple les signes qui pointent vers une équipe de la destinée. Depuis que je suis fan de sports, j’en ai vu plusieurs de ces équipes de la destinée : les Sox de 2004, les Cards de 2006, les Pats de 2001, les Giants de 2008, les Canadiens de 1986 et 1993, pour ne nommer que celles-là. Ces équipes, peut importe le sport, émettent à peu près toujours les mêmes signaux. Elles surmontent l’adversité, elles obtiennent des rebonds favorables, elles effectuent des remontées spectaculaires, elles forment des équipes soudées et unies, mais surtout, elles défient toute logique. Or, à force d’être confronté à ces signaux, tu repères assez facilement ces équipes un peu spéciales.

Généralement, la grande difficulté, c’est de savoir reconnaître les équipes de la destinée, qui remportent toujours le championnat de leur ligue, des équipes cendrillons, qui elles s’inclinent en finale (les Oilers en 2006, les Flames en 2004, les Ducks en 2003, les Sabres en 1999, les Panthers en 1996, les Canucks en 1994, etc.). Bien sûr, on ne peut véritablement savoir qu’une fois que le trophée est soulevé, et oui, c’est moi qui viens tout juste d’inventer ça, mais n’en demeure pas moins que ça fait du sens, puis merde, c’est mon blog après tout!

Après deux rondes, il faut reconnaître que le Canadien présente énormément de caractéristiques propres aux équipes de la destinée. Nos Glorieux ont d’abord surpris tout le monde en remontant un déficit de 3-1 pour finalement éliminer les puissants Capitals, les champions en saison régulière et l’une des plus belles machines offensives de l’histoire. Puis, l’équipe a poursuivi son parcours improbable en éliminant les Champions de la Coupe Stanley après une seconde série éprouvante de sept parties, une série où elle a également dû surmonter un déficit.

Elle a accompli tout ça malgré les nombreuses blessures à son groupe de défenseurs, dont Markov, son général à l’attaque ainsi que son joueur le plus utilisé, Spacek, l’un des meilleurs face aux Capitals et probablement son deuxième meilleur défenseur pour relancer l’attaque, et même le USS Hal Gill, le meilleur gardien du Canadien après Halak. Ce qui n’est pas rien lorsqu’on pense que le CH est d’abord une équipe défensive.

Ensuite, comme toute bonne équipe de la destinée, le Canadien est rempli de héros obscurs tels les Josh Gorges (de moins en moins obscur), le USS Hal Gill, Maxim Lapierre, Dominic Moore, Tom Pyatt, mais surtout PK Subban (on ne peu pas avoir plus obscur que Subban vu qu’on ne l’avait vu jouer que 2 fois avant son rappel). Le jeune prend tellement des bouchées doubles qu’il a avalé toutes les minutes qui reviendraient normalement à Markov. Sans conteste la plus grande surprise depuis le début des présentes séries, qui pourtant, ne manquent pas du tout de surprises, loin de là.

Note : Au début des séries, son entraineur Guy Boucher disait de lui qu’il n’était pas encore prêt pour la ligue Nationale. Eh bien, qu’est-ce que ça va être lorsqu’il sera enfin prêt!? Il est déjà  tellement bon qu’il mériterait d’avoir un cool surnom. Les médias anglophones l’ont déjà baptisé Little Bird, mais je ne trouve pas que ça lui sied bien. Non, petit, désormais tu seras le Black Bird, un croisement entre le légendaire Larry Robinson et le Lockheed SR-71 Black Bird, le célèbre avion-espion de mon enfance, jadis l’avion le plus rapide jamais construit.

Autre signe qui ne ment jamais lorsque vient le temps de repérer les équipes cendrillons ou les équipes de la destinée, le CH semble avoir les Dieux du sport de son bord. Les meilleurs exemples étant la rondelle qui a rebondi de façon très étrange pour rester en dehors du but lors du match #1 contre Washington, le but refusé à Ovechkin lors du septième match, et les 3 poteaux doublés du but chanceux de Gionta lors du match #6 contre Pittsburgh. À chaque fois, ces jeux m’on fait crier : Holly fucking shit, les fantômes sont enfin revenus de leurs vacances aux Îles Galapagos!!

Normalement, sachant que le Canadien présenterait toutes les caractéristiques d’une équipe cendrillon ou de la destinée, je serais plutôt calme en vue de la finale d’association. Mon seul problème, c’est que nos Glorieux vont affronter une autre équipe de la destinée, pire une équipe de la destinée spécialement taillée pour les séries, j’ai nommé les Flyers de Philadelphie.

Les Flyers ont peut-être assassiné la saison du Canadien lorsqu’ils ont rompu l’égalité de 3-3 lors du septième match de leur série face aux Bruins de Boston. Évidemment, on ne pourra jamais savoir, mais je suis convaincu que le Canadien aurait aisément défait Boston pour passer en finale de la Coupe si les Flyers n’avaient pas effectué leur remontée historique.

Maintenant, rien n’est moins sûr. Sur papier, les Flyers de Philadelphie représentaient déjà un très mauvais match-up pour le Canadien, mais avec l’exploit incroyable qu’ils viennent d’accomplir, le CH aurait affronté Team Canada que je n’aurais pas été plus terrorisé. D’abord parce qu’ils sont plus robustes que les Capitals et les Penguins. Ensuite, parce que contrairement à ces deux équipes, les Flyers ont Chris Pronger, un défenseur extrêmement robuste (une nouveauté pour les petits attaquants du CH), aussi efficace en défense qu’à l’attaque, et qui excelle toujours en série. Et finalement parce que Brière et Gagné sont aussi Québécois qu’en feu, ce qui n’est jamais de bon augure pour les matchs au Centre Bell.

Enfin, et c’est ce qui me fait le plus peur, les Flyers aussi présentent de très nombreux signaux qui les pointent comme étant une équipe de la destinée. Ils se sont qualifiés en tirs de barrage lors du tout dernier match de la saison régulière. Ils ont surpris et facilement écarté des Devils pourtant favoris en première ronde. Ils ont remonté un déficit de 3-0 dans la série ET lors du septième match contre les Bruins (l’histoire la plus incroyable depuis la remontée des Sox en 2004; karma is a bitch, n’est-ce pas Boston?). Ils ont sauvé leur saison en prolongation lors du quatrième match de la deuxième ronde alors que les Bruins avaient créé l’égalité dans la dernière minute. Ils ont subi encore plus de blessures que le Canadien (Carter, Laperrière, Gagné, Boucher). Ils ont une tonne de héros obscurs. Et finalement, parce qu’ils ne sont pas nécessairement les favoris, Laviolette ne prêchera pas par excès de confiance et portera une attention toute particulière à Cammalleri (je serais même surpris si Cammy comptait deux buts contre les Flyers).

En somme, étant donné que les Flyers aussi ont apparemment les Dieux du sport de leur bord, attendez-vous à rien de moins qu’une guerre sainte entre ces deux équipes. Une longue et pénible bataille qui déterminera laquelle de ces équipes sera l’équipe cendrillon ou l’équipe de la destinée. Surtout que les équipes de la destinée, c’est comme dans le Highlander, à la fin, il ne peut en rester qu’une. «Here we are, born to be kings… We’re the princes of the universe…»

Maxime Paiement

Critique sportif

1 Réponse to “Destinée”


  1. 1 Nicolas Monette 16 Mai 2010 à 16 h 18 mi

    Waterworld… Nice one!


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